
Tensions au palais : Tahnoun ben Zayed dans le viseur des services marocains
Les chapitres du conflit interne au sein du système marocain se poursuivent, dans un contexte d’escalade de la “guerre des positions” entre les différentes factions du pouvoir sur la question de la succession, alors que l’état de santé du roi Mohammed VI se détériore.
Au milieu de cette bataille invisible désormais exposée au grand jour, de récentes accusations visent des responsables émiratis, au premier rang desquels Cheikh Tahnoun ben Zayed, vice-gouverneur d’Abou Dhabi et conseiller à la sécurité nationale des Émirats arabes unis.
Selon le site Al-Khabar, l’institut géopolitique marocain Horizons a, dans une analyse, accusé Cheikh Tahnoun ben Zayed d’être derrière ce qu’il qualifie de “guerre cognitive” contre le Maroc — une offensive qui viserait, selon la même source, à “saper la légitimité monarchique, fragmenter la cohésion nationale et remodeler les équilibres d’influence dans les espaces maghrébin et africain.”
L’institut indique que cette “attaque informationnelle” s’intensifie depuis 2024, à travers des fuites massives de données, des campagnes de désinformation médiatique et des narratifs hostiles pilotés depuis Abou Dhabi, dans le cadre d’une stratégie orchestrée par Tahnoun ben Zayed, à la tête des services de renseignement émiratis.
Le rapport accuse notamment Tahnoun de soutenir un “soulèvement interne” au sein de l’appareil d’État marocain, en référence à l’affaire Mehdi Hajjaoui, ancien numéro deux du renseignement extérieur marocain — considéré comme le “coffre-fort du régime” — qui aurait bénéficié, après sa défection, d’un appui émirati.
Le document met également en lumière le compte Telegram “Jabbarout”, qui a divulgué des milliers de documents sensibles ayant embarrassé le Makhzen, notamment ceux liés à la vie privée du prince héritier marocain, le prince Hassan.
L’institut estime qu’il existe une “synchronisation stratégique” entre les fuites de “Jabbarout” et des articles publiés par le quotidien Le Monde, dont un dossier intitulé “La fin du règne de Mohammed VI”, suggérant une “coordination indirecte” entre le journal français et ce qu’il appelle les “structures numériques émiraties.”
Dans ce même contexte, le rapport relie l’attaque contre Tahnoun à un clan particulier au sein du pouvoir marocain : l’institut Horizons, ainsi que le site Barlamane.com, seraient proches du directeur général de la sûreté nationale et du renseignement intérieur, Abdelatif Hammouchi, bénéficiant de soutiens français et israéliens.
Selon Al-Khabar, Hammouchi accuse ses rivaux au sein du système — dont le chef du renseignement extérieur, Yassine Mansouri, lié aux Émirats — de comploter contre les intérêts intérieurs et extérieurs du Maroc.
Le site Barlamane.com a, en juillet dernier, publié une série d’articles visant Tahnoun ben Zayed, parmi lesquels : “Quand Le Monde devient un porte-voix payé dans l’affaire Mehdi Hajjaoui”, et un autre sur un réseau d’escroquerie mené par Hajjaoui, établissant un lien confirmé entre ce dernier et l’entourage de Tahnoun.
La crise au sein du Makhzen semble avoir dépassé la compétition traditionnelle pour le pouvoir, pour se transformer en un conflit ouvert entre factions soutenues par des forces régionales et internationales, à un moment politiquement critique pour le royaume.
Les rapports soulignent que le soutien israélien et français accordé à Hammouchi se heurte à l’influence croissante des Émirats à travers leurs relais politiques et médiatiques au sein de l’entourage royal.
La même source ajoute que la dégradation de l’état de santé du roi Mohammed VI et ses longues absences de la scène publique exacerbent le conflit au palais, faisant émerger de vraies interrogations sur l’avenir du pouvoir et sur qui dessinera les contours du “Maroc post-Mohammed VI.”